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 "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".

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bor
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B�la Tarr - "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".  Empty
MessageSujet: "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".    B�la Tarr - "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".  Empty07.03.11 14:47

dit Béla Tarr dans cette émission de Arte: http://videos.arte.tv/fr/videos/metropolis-3750178.html

Citation :
Dossier Hongrie
Alors qu’une loi visant la liberté des médias met la Hongrie au cœur de l’actualité européenne, Metropolis est parti en reportage à Budapest, pour en savoir plus sur l’état de la création et de la culture dans le pays.
La politique culturelle hongroise se veut « nationaliste et conservatrice ». De nouvelles figures, proches de gouvernement de Viktor Orban, sont nommées aux têtes des principales institutions culturelles, les financements changent, les intellectuels prennent position. Qu’est-ce que cela signifie exactement pour la place de la culture en Hongrie ?
Rencontre également avec des producteurs et avec les cinéastes Béla Tarr et Agnes Kocsis, pour savoir comment faire du cinéma aujourd’hui en Hongrie, à l’heure où, pendant que tous les financements sont gelés, les studios du pays accueillent de grosses productions internationales…

vu la vidéo: c'est catastrophique pour toute la culture, c'est vraiment la fin de tout - au sens propre! - sauf évidement ce que veut la nouvelle "dictature" de l'esprit et des sens - car appelons un chat un chat: qu'est-ce d'autre, quand un pouvoir balaie tout ce qui existe pour le remplacer par autre chose, sans laisser d'autre choix que de résister, se soumettre ou s'exiler ? La démocratie serait de lancer une nouvelle politique culturelle en parallèle, sans détruire ou étouffer l'ancienne, sans fermer tout ce qui ne plaît pas - on est vraiment loin de cela!

J'ai besoin de voir écrit ce que j'entends, et pour mémoire, ce qui est dit dans cette vidéo est souvent incroyable, donc voici une transcription de l'essentiel, voire de presque tout (merci à Lebedias pour la relecture et les corrections):


Le commentateur évoque d'abord la nouvelle loi sur les médias sur des images d'une manifestation devant le parlement (on a évoqué cette loi ici - donc je passe) Il continue ainsi:
« Plus généralement ils protestent contre la nouvelle politique culturelle, celle des coupes de subventions aux théâtres indépendants, de la préférence pour l'art traditionnel, des attaques contre les intellectuels, et du remplacement des directeurs des grandes institutions.
A l'opéra national par exemple, le directeur musical a claqué la porte en octobre dernier, il refusait que des proches du nouveau gouvernement lui dictent ses choix artistiques. Depuis, la direction a été confié à un artiste manageur qui s'est entouré d'un ancien de BMW et d'IKEA ».

Ce directeur de l'opéra déclare:
« La politique ne devrait pas se mêler de culture, ce n'est jamais bon que la politique interfère avec la culture. La culture se doit d'être pure, elle doit montrer l'exemple. Cela doit être quelque chose de beau, de positif. Il ne faut pas attaquer le public. Le public est confronté en permanence au monde tel qu'il est, alors il faut lui donner à voir des choses belles, idéales. L'opéra national hongrois est une institution conservatrice, mais il doit aussi présenter des œuvres modernes. Mais le public préfère les mises en scène classiques ».

Le commentateur:
« Ça tombe bien, puisque le premier ministre souhaite développer une culture nationale conservatrice. Voici Gödöllö (--), on a rendez-vous avec le secrétaire d'état à la culture. Son budget a été réduit de 20% l'année dernière, mais il compte sur l'Europe pour compenser ses coupes budgétaires ».

Le secrétaire d'état à la culture déclare:
« Les caisses de l'état sont presque vides, mais, même s'il y avait de l'argent, ce n'est pas à la culture qu'il serait consacré ».

Le commentateur:
« Pour lui le choix d'une politique nationale conservatrice a des raisons historiques ».

Suite des propos du secrétaire d'état à la culture:
« Durant la monarchie, la culture hongroise a dû se forger malgré une forte pression autrichienne. Dans l'entre deux guerres, c'est l'Allemagne qui a exercé une influence négative. Et pour finir, on a eu à subir un demi-siècle de bolchévisme. Il est donc compréhensible qu'un chef de l'état tente de revenir aux racines de la culture nationale. C'est indispensable pour rendre à la nation son indépendance d'esprit ».

Le commentateur:
« L'appropriation de l'histoire nationale est donc un enjeu de taille en Hongrie. L'institut de 1956 travaille sur le soulèvement populaire contre le régime communiste en 1956 et sur la répression menée par l'armée rouge. Ses recherches s'étendent jusqu'à la fin du bloc communiste. En avril prochain, sur décision du gouvernement Orbàn, l'institut sera fermé, comme 35 autres centres de recherches publiques ».

Le responsable de L'institut de 1956:
« On nous a jamais dit ni officiellement, ni officieusement, quel était le problème. En fait il est double: d'un côté nous avons la logique gouvernementale qui est clairement de concentrer et de renforcer au maximum le pouvoir de l'état; de l'autre, ce qui arrive à L'institut de 1956 n'est qu'un des nombreux aspects de la politique de lutte contre l'indépendance des intellectuels ».

Le commentateur ou une traduction synthétisée du responsable:
« L'histoire qui plaît au gouvernement, c'est celle qu'on peut voir à la "Maison de la terreur". Le bâtiment fut le siège des croix fléchées, les milices hongroises pro-nazies puis celle de la police politique communiste. Aujourd'hui, c'est devenu une sorte de lieu de mémoire événementiel. Sa philosophie: le fascisme hongrois c'est mal, mais le communisme c'est l'horreur ».

Le responsable de L'institut de 1956:
« Pour eux, la version correcte de l'Histoire, c'est celle qui sert leurs objectifs politiques, celle qui montre du doigt l'ennemi, l'aile gauche du parti socialiste, c'est-à-dire les successeurs de l'ex parti communiste ».

Le commentateur:
« Depuis 2002, Victor Orbàn s'est bâti un empire médiatique privé sur le modèle de celui de Silvio Berlusconi en Italie. Sa loi sur les médias lui permet de contrôler aussi l'audiovisuel publique. En réaction, quelques artistes et réalisateurs ont créé une TV hongroise totalement indépendante ».

L'un des responsables de cette TV:
« C'est une télé privée, fondée sur le volontariat, sans aucun budget. Officiellement, on est le pendant hongrois de l'Amerikai Nepszava »

Le commentateur:
« Chaque semaine, une émission de débats et de reportages est diffusée via un site internet hongrois basé à New York pour échapper à la loi sur les médias ».

L'un des responsables de cette TV
« Ce genre de situation n'a rien de nouveau pour l'opposition, des intellectuels, et surtout les artistes. On n'a pas peur, tout va bien pour nous. Au contraire, être dans l'opposition nous est assez familier ».

Le commentateur:
« Autre pan de la culture particulièrement touché par la politique de Victor Orbàn, le cinéma. Pour faire des films en Hongrie aujourd'hui, mieux vaut ne pas être hongrois. Cette ancienne base de missiles abrite désormais les studios Corda sorte de nouvel Hollywood sur le Danube. La main d'œuvre qualifiée est bon marché, les abattements de charge de 20% ont déjà séduit Jeremy Irons, Angelina Jolie et bientôt l'équipe d'Astérix 3. Mais ces studios restent hors de portée pour la plupart des productions locales ».

Le responsable hongrois des studios Corda:
« L'année dernière, on a tourné deux films hongrois assez importants dans ces studios, mais globalement, la plupart des films hongrois n'ont pas la taille nécessaire pour jouer un rôle significatif dans la vie de notre studio ».

(On passe des images du film Agnes Kocsis) Le commentateur:
« Le film, sélectionné l'année dernière à Cannes, a remporté près de dix prix dans 30 festivals. 8 mois plus tard, l'équipe du film se bat encore pour qu'il soit vu ».

Agnes Kocsis :
« le film est sélectionné dans des festivals un peu partout dans le monde, mais on n’arrive pas à le distribuer, ni en Hongrie, ni dans aucun autre pays. S'il ne sort pas en salle avant le mois de mars, il ne sortira probablement jamais ».

« Tout cela parce que depuis l'été dernier, le gouvernement actuel a dissous la Fondation du cinéma hongrois, clef de voute du système, accusé de mauvaise gestion, et même de corruption. Du jour au lendemain, films, documentaires, dessins animés, festival école, réseaux art et essais, tout a été bloqué, y compris l'argent qui devait permettre la distribution d'Adrienn Pál ».

Le commentateur:
« Ces studios appartiennent encore à la Fondation du cinéma. Ils abritent de nombreuses sociétés de production en grosses difficultés financières. En cas de liquidation par le nouveau gouvernement, le tout pourrait donner lieu à une privatisation juteuse. C'est ici que Béla Tarr, l'un des plus grands cinéastes hongrois, vient de finir son dernier film, Le cheval de Turin ».

Béla Tarr:
« Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok. C'est tout. En Europe, aucune culture cinématographique ne peut survivre sans le soutien de l'état. C'est totalement impossible. Ils vont produire deux ou trois grands films historiques sur nos merveilleux héros nationaux, parce qu'ils veulent rendre au peuple une certaine dignité. Ils pensent, ils sont convaincus plutôt, que tout ce qu'on fait, nous, c'est de parler de dépression, de problèmes. En réalité, on essaye de montrer la vraie vie. Et c'est cela, je crois, qu'ils n'aiment pas trop ».

Le commentateur qui traduit (avec une autre personne) une réalisatrice:
« Le documentaire Inkubator est l'un des rares succès du genre en Hongrie. La réalisatrice, elle-même hongro-américaine, y suit avec humour des Hongrois exilés aux USA après 1956 et les complexes de l'après socialisme. Son prochain film devait porté sur l'héritage de la police politique communiste, mais vu le contexte, le projet est menacé. Je ne sais pas si je vais trouver un financement. J'adore le sujet, mais je ne peux pas faire le film sans argent. Alors je vais choisir un sujet international. Je crains de devoir quitté la Hongrie quelques années, avant de pouvoir peut-être y revenir. Ils pourraient se contenter de dire qu'il n'y a pas d'argent. Mais non, ils préfèrent nous accuser de tous les maux: dire qu'on est corrompu, qu'on gaspille l'argent de l'état, qu'on le vole même. Mais ils pensent peut-être qu'en dressant l'opinion publique contre l'industrie du film, il leur est plus facile de supprimer les financements. C'est une stratégie bizarre. Je ne vais ça nullement par ailleurs. Soit on réduit un budget, soit on le maintient. Mais réduire un budget tout en faisant passer les gens pour des délinquants, c'est nouveau. Et ça marche! »

Le commentateur:
« Les cinéastes viennent de publier une lettre ouverte pour protester contre la nouvelle politique hongroise. Comme tous les artistes, ils ont désormais le choix entre résister, se soumettre ou partir ».

oooooooooooooooooooooooooooooooooooooooo

Mon propre commentaire:

Alors on comprend mieux https://centraleasteurope.1fr1.net/t2191-liberte-d-informer-de-s-exprimer-en-hongrie-quel-avenir
et surtout le désespoir de Béla Tarr et le sens qu'il donne à son film:
https://centraleasteurope.1fr1.net/t2211-festival-de-berlin-2011
et au fond aussi le choix de ne présenter au salon des livres à Paris que des livres français!...
https://centraleasteurope.1fr1.net/t2216-la-grand-messe-du-livre#14684




Dernière édition par bor le 09.03.11 23:17, édité 9 fois
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lebedias
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MessageSujet: Re: "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".    B�la Tarr - "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".  Empty07.03.11 22:43

bor a écrit:

"Ça tombe bien, puisque le premier ministre souhaite développer une culture nationale conservatrice. Voici Gödöllö (--), on a rendez-vous avec le secrétaire d'état à la culture. Son budget a été réduit de 20% l'année dernière, mais il compte sur l'Europe pour compenser ses coupes budgétaires"

Comme pour contredire le secrétaire d'état:
L'Europe veut-elle achever son cinéma?
L’UE remet en cause son programme de subventions, la Hongrie taille dans les aides et la situation se dégrade encore en Angleterre et en Italie… Les cinéastes se mobilisent pour sauver les films du Vieux Continent.

"Si l'on supprime cette aide, les films de Béla Tarr, par exemple, ne seront vus nulle part, c'est certain."

http://www.lesinrocks.com/cine/cinema-article/t/61059/date/2011-03-07/article/sauve-qui-peut-le-cinema-europeen/

Zs.
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bor
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MessageSujet: Re: "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".    B�la Tarr - "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".  Empty28.04.16 15:33

Béla Tarr De la colère au tourment
par Sylvie Rollet et Corinne Maury
ISBN978-2-87340-373-7
ÉditeurYellow now
Date de publication 03/2016
Nombre de pages176
Prix : 25 €

B�la Tarr - "Tout ce qui nous reste, c'est le salami et Béla Bartok".  G1vAkY9

Citation :
Béla Tarr déclarait en 1987 : " Je déteste les histoires, puisque les histoires font croire qu'il s'est passé quelque chose. Or il ne se passe rien : on fuit une situation pour une autre. De nos jours, il n'y a que des situations, toutes les histoires sont dépassées. Il ne reste que le temps. La seule chose qui soit réelle, c'est probablement le temps. " Ces propos, qui sont programmatiques de l'oeuvre du cinéaste, éclairent ce qui l'a amené - à l'orée des années 80 - à abandonner l'approche sociocritique qui fondait ses premiers films dont les histoires humaines étaient tissées des espoirs déçus du communisme. Avec la " trilogie démoniaque " (Damnation, Sátántangó, Les Harmonies Werckmeister), Béla Tarr entame une collaboration avec le romancier László Krasznahorkai. Il ne cessera, dès lors, de filmer les laissés pour compte qui parcourent les plaines boueuses de la Hongrie postcommuniste et s'égarent dans des bars vétustes, manipulés par de petits escrocs. Il élit un formalisme cinématographique strict et singulier : pellicule noir et blanc, travellings latéraux, longs plans au steadycam accompagnant ceux qui errent, filoutent, épient ou, simplement, attendent. Enfermés dans des situations de désintégration de plus en plus radicales, hommes et animaux ont surtout pour lien la pluie, le vent et la boue qui rythment le quotidien. De la colère et de la révolte des premiers films aux oeuvres récentes empreintes de désillusion, cet ouvrage propose de questionner l'oeuvre d'un cinéaste majeur et pourtant trop méconnu. Une oeuvre où se manifeste, dans un formalisme radical à la beauté noire, le déclin inflexible des existences et le passage implacable du temps.
Code:
Source: http://mardishongrois.blogspot.fr/2016/04/bela-tarr-de-la-colere-au-tourment.html

D'après http://www.univ-paris3.fr/bela-tarr-de-la-colere-au-tourment-corine-maury-sylvie-rollet-dir-ed-yellow-now--374047.kjsp
ce livre rassemble d'autres contributions

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