Note de la fondation Robert Schumann d’ avril 2006 : La pauvreté en Europe, quelles réalités ?
16 % de la population européenne, soit 72 millions de personnes, vivaient en 2003 en dessous des seuils de pauvreté monétaire." soit seulement 3% de moins qu'en 1994 .Telle est la conclusion d'une étude de Sarah Bouquerel et Pierre-Alain de Mallerey, deux économistes maîtres de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris, que vient de publier la Fondation Robert-Schuman.
Techniquement, la mesure utilisée est la suivante : un ménage qui dispose de moins de 60 pourcents du revenu moyen du pays est considéré comme pauvre. Exprimée sous la forme de standards de pouvoir d'achat (SPA), le seuil de pauvreté en 2001 était de 2 183 en Estonie et de 14 376 au Luxembourg par exemple.
"La tendance générale, à court terme et à long terme, est au recul général de la pauvreté, notent Mme Bouquerel et M. de Mallerey. Il y a moins de pauvres dans l'Union européenne qu'en 1970, même si la réalité perçue par l'opinion publique ne va pas nécessairement dans ce sens."
La pauvreté recul, mais lentement. En fait, tout dépend la manière de mesurer cette pauvreté. Les critères habituellement proposés montrent un recul, mais ils ne prennent en compte que des mesures monétaires de pauvreté, or la pauvreté doit aussi se mesurer en « conditions de vies », par exemple le fait de pouvoir ou non partir en vacances, s’ acheter une voiture…D’ où la différence entre les chiffres qui annoncent un recul de la pauvreté et le ressenti des gens. La pauvreté est à la fois objective, liée aux revenus, et subjective, liée aux représentations sociales, qui varient selon les contextes et les pays.
En 1984, un Conseil européen avait tenté de prendre en compte ces deux dimensions : "Des personnes vivent dans des situations de pauvreté si leur revenu et leurs ressources matérielles, culturelles et sociales sont à ce point insuffisants qu'elles les empêchent d'avoir des conditions acceptables dans le pays membre où elles vivent."
Les Etats membres de l'Union européenne ont finalement décidé de retenir celui "de pauvreté monétaire relative".
Les pays enregistrant les résultats les plus défavorables sont la Slovaquie, l'Irlande et la Grèce (21 % de la population en situation de pauvreté), suivis du Portugal, de l'Italie, de l'Espagne (19 %), du Royaume-Uni et de l'Estonie (18 %). A l'autre extrémité, on trouve la République tchèque (8 %), le Luxembourg, la Hongrie et la Slovénie (10 %), suivis de la Finlande et de la Suède (11 %), du Danemark, de la France, des Pays-Bas (12 %) et de l'Autriche (13 %).
Le rôle de l’ Europe en matière de lutte contre la pauvreté n’est pas vraiment reconnu, la question se traite davantage au niveau des états membres. Ceci dit, certaines politiques Européennes, constituent d’ importants leviers, qui contribuent au rattrapage des pays ou des régions les plus en retard.
En tout cas, le rêve des pères fondateurs d’ un développement économique et social par le marché commun, la croissance économique entraînant le bien être social et la diffusion ne semble pas vraiment se concrétiser. La croissance faible a en effet tendance à s’ installer en Europe. Surtout le marché semble davantage perçu comme une menace favorisant les inégalités plutôt que comme un vecteur de rattrapage du niveau des vies des mieux lotis par les populations les plus défavorisées.
Dans la réalité, en Slovaquie par exemple, en jetant un simple coup d' oeil sur les routes, on voit d' un côté, ceux qui circulent encore à vélo ou même à pieds, et ceux qui possèdent des voitures très haut de gamme, pour lesquelles les premiers devraient bosser au moins 50 ans avant de pouvoir se l' offrir...
http://www.lemonde.fr 10 mai 2006
http://www.robert-schuman.org/notes/note31.pdf